Lectures à voix haute
PSerré (20)

Faire entendre l’écriture

Je pratique une lecture à voix haute qui porte à son fronton l’inscription « Faire entendre l’écriture ». Tout mon travail (choix d’extraits, lecture à proprement parler) est soumis à cet impératif. Parler de lecture « neutre » n’a pas de sens, je préfère utiliser le terme de lecture sobre. Ce n’est pas un spectacle, il n’y a rien à voir mais tout est à entendre.

Cette pratique de la lecture à voix haute est plus proche de la musique que du théâtre (partition, silences, rythme, notes, …). C’est pourquoi je propose une version musicale pour toutes ces lectures, accompagnées alors de musicien(ne)s professionnel(le)s qui viennent par les notes de compositeurs accompagner les mots de l’auteur. Les mots sont alors des notes, et les notes des mots.

Et comme toujours avec la Cie Oculus, la lecture se termine par une discussion, sans quoi tout cela aurait pour moi moins de sens.

Julien Pillot, responsable artistique de la Cie Oculus

Cris

de Laurent Gaudé (Actes Sud, 2001)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

Cris est le premier roman publié de Laurent Gaudé. C’est une suite de prises de parole au style direct de jeunes soldats engagés dans la guerre de 14-18. C’est un roman au plus près des soldats, de leur(s) peur(s), de leurs cauchemars, mais aussi de leur solidarité dans l’absurdité d’une guerre qui les dépasse et n’a plus de visage.

Laurent Gaudé, déjà connu pour ses pièces de théâtre, a 29 ans lorsque ce roman est publié. Né à Paris en 1972, il n’a jamais connu la guerre. Mais il a une forte conscience des guerres qui sont toujours à l’œuvre dans le monde et ressent comme une nécessité d’écrire un roman sur la guerre. Il décide alors de situer ce roman dans la guerre des tranchées de 14-18. Les paroles de ses soldats sonnent juste, comme de véritables lettres de poilus (ce qu’elles ne sont pourtant pas).

Penser qu’à moins de trente ans, cet auteur ait pu écrire un livre si humain, si doux et si grand, est assourdissant. C’est là un grand livre, un livre nécessaire, l’œuvre d’un homme qui sait retranscrire des impressions qu’il n’a pourtant pas vécues.

L’œuvre d’un grand écrivain.

La Route des Clameurs

de Ousmane Diarra (Gallimard, Continents Noirs, 2014)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

La Route des Clameurs est le troisième roman de l’auteur malien Ousmane Diarra. Il décrit l’invasion du Nord Mali par les djihadistes à travers les yeux de son narrateur, un enfant qui reste aux côtés de son père, artiste peintre qui refuse de quitter son village et tient têtes aux extrémistes.

Un roman à hauteur d’enfant donc. Un roman puissant, et surtout la parole d’un Malien, amoureux de son pays. Après les tristes événements des attentats en France et ailleurs en Europe et dans le Monde, cette parole issue du Mali, avec la beauté de la langue du conteur africain qu’est l’auteur, est forte, positive, et même drôle, donc revigorante.

Ousmane Diarra a été accueilli en résidence d’écriture à La Maison des Écritures de Neuvy-le-Roi en 2015 et Julien Pillot l’a alors rencontré. Au fil de plusieurs discussions, Ousmane a pu lui raconter son amour du Mali, et l’histoire de son pays.

La discussion d’après-lecture s’en trouve fortement enrichie.

Tant Bien que Mal

de Arnaud Dudek (Alma Éditeur, 2018)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

Tant Bien que Mal est le cinquième roman d’Arnaud Dudek, jeune auteur français remarqué pour son premier roman « Rester Sage » (finaliste du Goncourt du Premier Roman et adapté au théâtre par notre compagnie), et pour son second roman Les Fuyants dont Bernard Pivot a écrit : « Arnaud Dudek a le talent de raconter les malheurs de la vie avec des bonheurs d’écriture« .

Un petit garçon rentre de l’école. Un homme portant une boucle d’oreille lui demande s’il peut l’aider à retrouver son chat. Il conduit une Ford Mondeo. La forêt est toute proche.
Le petit garçon de sept ans est mort en partie ce soir-là et n’en dira rien à personne.
Délicatement, Arnaud Dudek monte sur le ring. Il raconte comment vit et grandit un enfant violé. Comment il devient adulte, père. Et ce qu’il fait lorsque, vingt-trois ans après les faits, il reconnaît l’homme à sa voix. (texte de l’éditeur)
Dans ce cinquième roman, Arnaud Dudek (que nous avons rencontré par notre adaptation de Rester Sage) aborde avec son tact et sa douceur un sujet qui pourrait effrayer plus d’un auteur.
Il en ressort un livre subtil, touchant, émouvant.
Un livre court, un grand livre.

Une Plage au Pôle Nord

de Arnaud Dudek (Alma Éditeur, 2014)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

Une Plage au Pôle Nord est le troisième roman d’Arnaud Dudek, un de nos auteurs chouchous puisque nous avons adapté son premier roman Rester Sage et que depuis c’est un proche de la compagnie dont il soutient et connaît le travail.

Une Plage au Pôle Nord, c’est la rencontre improbable de deux univers que tout pourrait opposer, à l’image de la rencontre entre Jean-Claude, trentenaire paumé et triste, et Françoise, septuagénaire esseulée, et triste aussi.

Où comment l’amitié est une question de personne plus que d’âge.

Une fois de plus, on retrouve l’écriture ciselée, fine et si drôle d’Arnaud Dudek qui sait nous raconter les vies ordinaires avec le décalage, l’humour et la sensibilité d’un auteur qui aime ses personnages autant qu’il en rit.

Un roman frais comme la banquise, doux comme le sable : bienvenu dans l’univers insolite et pétillant d’Arnaud Dudek.

Souvenirs de la Marée basse

de Chantal Thomas (Seuil, 2017)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

Souvenirs de la Marée basse est le dernier roman de Chantal Thomas, auteur à la longue bibliographie, notamment spécialiste du XVIIIème siècle. C’est un roman sur la mer… et sur la Mère. Au gré de ses souvenirs d’enfant sur la plage d’Arcachon, Chantal Thomas nous raconte sa mère, et nous raconte la mer. Il est question de natation, d’histoires d’enfants, de Versailles et de la marche à quatre pattes.

L’écriture de Chantal Thomas se déploie magnifiquement en de longues et belles phrases emplies de douceur et de poésie. Les images sont nombreuses à l’écoute de ces mots et tous les sens sont convoqués pour nous emplir de l’intensité du présent qui est celle de l’enfance.

Un voyage en enfance, un voyage au soleil et sur le sable, un voyage dans l’eau.

On ferme les yeux, on est ailleurs.

Les Huit Montagnes

de Paolo Cognetti (Stock, 2016)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

Les Huit Montagnes est le second roman de Paolo Cognetti, jeune auteur italien prometteur (il reçoit le Prix Strega, équivalent italien du Prix Goncourt, ainsi que le Prix Médicis Étranger) et passionné de montagne.

C’est un roman sur le Père et, donc, sur la montagne.

Pietro est un enfant de la ville, qui rencontre Bruno, un enfant de la montagne, lors d’une de ses escapades vacancières. Ensemble, une amitié d’enfant va les lier. Puis il se perdront de vue. Vingt ans plus tard, après le décès de son père, qui lui a légué un lopin de terre avec une ruine, Pietro retourne dans la montagne et retrouve Bruno, devenu maçon. Ensemble, ils redonnent une vie à cette ruine et Pietro renoue avec son passé, avec son père, aux sommets des montagnes qui les entourent.

Un livre magnifique, une langue terrienne et ancrée, une écriture poétique et bouleversante.

Pas dupe

de Yves Ravey (Les Éditions de Minuit, 2019)

Durée : 1h + discussion

(1h10 pour la lecture musicale)

 

On retrouve le corps de Tippi, la femme de monsieur Meyer, parmi les débris de sa voiture au fond d’un ravin.
L’inspecteur Costa enquête sur ce drame : accident ou piste criminelle ?
Monsieur Meyer se plie aux interrogatoires de l’inspecteur, ce qui n’est pas de tout repos.

Dans Pas dupe, on retrouve avec bonheur l’écriture finement ciselée de Yves Ravey. On suit le tissage d’une toile par un inspecteur qui fait des tours et des détours, nous rappelant une certain Colombo joué par Peter Falk.

Yves Ravey nous fait lire la différence entre ce qui est pensé et ce qui est dit. Le subtil décalage qu’il opère, l’apparente absence de description ou d’émotion n’est qu’un tour de magie. Par le signe minimal, Yves Ravey nous permet de vivres une multitude d’images et de situations. Une écriture très précise et dont on ne peut décrocher !